Pour mon anniversaire en 2021 Philippe m’a offert une édition limitée: JACE à Tchernobyl.
Nous avons décidé d’en faire profiter nos hôtes sous forme de tableaux dans les chambres.
Extrait de ce que nous dit l’artiste à propos de cet acte engagé:
Marqué à vie par la catastrophe du 26 avril 1986, l’artiste s’est lancé le défi d’aller sur place pour y exprimer son émotion à travers son art : le graff.
Résultat : 26 peintures mettant en scène son personnage fétiche dans la zone encore désertée. Un devoir de mémoire en hommage aux nombreuses victimes de cette tragédie.
Le 26 avril 1986, le cœur du réacteur 4 de la centrale de Tchernobyl, en Ukraine (ex-URSS), explosait. C’est la pire catastrophe nucléaire que l’humanité ait connue. Comme beaucoup de monde, Jace se rappelle ce qu’il faisait, où il était, lorsqu’il a appris la nouvelle.
Ce jour tragique du 26 avril 1986 a changé la vie de centaines de milliers de personnes, dont beaucoup ont vécu – et vivent encore – dans une indifférence générale. Afin de lutter contre l’oubli, Jace a entrepris une démarche artistique en se rendant sur place, à Tchernobyl, à l’endroit même de la catastrophe. Un projet de longue haleine, mûrement réfléchi.
Un engagement fort et militant.
« Le but de ce projet est de dénoncer la folie et l’absurdité humaine qui, à travers des soi-disant progrès scientifiques, conduisent à sa propre perte », explique Jace. A travers sa démarche engagée, l’artiste pointe ainsi du doigt l’obstination à exploiter et à développer une technologie qui a prouvé sa dangerosité.
Dans ces lieux fantômes, 26 peintures (en référence à la date de l’événement) ont ainsi été disséminées dans le « no man’s land » de la zone d’exclusion, sur un rayon d’une trentaine de kilomètres et d’une surface totale de 2600 m2. Ces œuvres stylisées et remplies de couleurs donnent vie aux ruines de Tchernobyl, en s’intégrant dans le paysage sans le dénaturer.
Les peintures semblent anecdotiques, mais leur portée est hautement symbolique : prouver qu’en 2019 on peut retourner dans cette zone sans masque et sans risque majeur pour la santé. Symbolique aussi car chacune des œuvres a tenu compte du contexte dans lequel elle se trouvait en respectant la mémoire du lieu.
A travers ses réalisations, l’artiste engagé veut interpeller le visiteur avec une nouvelle présence humaine. Les Gouzous apportent un peu d’humanité, comme une lueur d’espoir dans un endroit qui a été saccagé et pillé à la suite de l’explosion.
« Après tous les mensonges dont on a été abreuvé à travers les médias (le fameux nuage qui se serait arrêté aux frontières de la France, ndlr), je souhaitais également me rendre compte personnellement de la vérité qui entoure ce lieu chargé de mystères et de mythes pour toute une génération ».
La ville fantôme de Tchernobyl n’est plus que l’ombre d’elle-même. La nature reprend vite ses droits en recouvrant peu à peu les vestiges du passé. Pourtant, dans ces paysages ravagés, des ouvriers, des techniciens et des employés, continuent à vivre et à travailler, notamment à la sécurisation du réacteur 4. Des personnes avec lesquelles l’artiste a pu échanger sur place et leur expliquer sa démarche, laquelle est bien accueillie.
« Rendre visible un mail invisible »
Car l’autre enjeu de ce projet audacieux, hormis le fait d’être une première au plan mondial, c’est de montrer des vies brisées par ce mal invisible que peut représenter la radioactivité.
« A travers ces peintures, je montre qu’avant la catastrophe il y avait une vie avec des habitants qui ne de doutaient pas que du jour au lendemain, cet incident allait changer leur vie à jamais, et ce à tous les niveaux. »
La concrétisation de ce projet est un devoir de mémoire. Une manière de rendre hommage aux victimes, directes et indirectes, de cette catastrophe.
« Je veux aussi sensibiliser le monde sur ces gens qui malgré tous les risques encourus ont choisi de rentrer sur leur terre et regagner leur maison en acceptant les conséquences. Pendant que nous menons notre train-train quotidien, ces personnes sont en mode survie et se sentent abandonnées. Aujourd’hui plus personne ne parle d’elles », souligne Jace. Et de conclure : « à mon niveau, j’aime à penser que j’ai apporté à cette terre et à ces gens une heure d’espoir, d’humanité et de joie ».
De ce voyage exceptionnel, Jace a ramené des images qui seront dévoilées à l’occasion d’une exposition et d’une projection vidéo à l’Ile de de la Réunion en fin d’année.
A propos de JACE
Jace est un graffeur français né au Havre en 1973, qui œuvre dans la rue depuis 1989. Il vit et travaille à la Réunion. En 1992, Jace crée un personnage emblématique et facétieux qu’il nomme « Gouzou ». C’est le début d’une longue aventure puisque désormais les Gouzous sont mondialement connus pour avoir voyagé dans plus d’une quarantaine de pays et territoires. Avec sa mascotte au graphisme épuré, leur créateur fait passer des messages simples et efficaces, qu’ils soient sociétaux, politiques ou environnementaux. Son étendue se veut non seulement universelle, mais aussi foncièrement humoristique – et toujours originale. Jace en effet met un point d’honneur à imaginer des mises en situation différentes en fonction de l’inspiration du moment ou du contexte. Chaque fresque extérieure ou travail en galerie est unique, ce qui fait sa spécificité.